Pourquoi s’intéresser à sa respiration, une activité vitale qui se fait de façon automatique? Premièrement, parce qu’apprendre à bien respirer avec une bonne mécanique et savoir prendre de bonnes respirations profondes vient avec son lot de bénéfices, par exemple, pour apprendre à mieux s’activer et à mieux se relaxer.
Le diaphragme est le muscle principal de la respiration. Il fait partie d’un groupe de muscles qu’on appelle « core » en anglais. On pourrait traduire par « unité centrale ». Les différents partenaires avec lesquels il forme notre unité centrale sont les muscles des abdominaux profonds (transverse de l’abdomen et en partie obliques internes et externes), du plancher pelvien et de muscles du dos (multifides). Ils travaillent en équipe pour stabiliser notre tronc et notre bassin tout en permettant de bouger de façon harmonieuse. Une bonne unité centrale peut, entre autres, aider à prévenir plusieurs problèmes musculosquelettiques (ex : maux de dos) et génito-urinaires (ex : fuites d’urine, douleurs pelviennes et génitales).
À l’inspiration, le diaphragme se contracte et descend, l’air entre dans les poumons. Il « pousse » sur les organes de l’abdomen et s’accompagne d’un léger relâchement/étirement au niveau du périnée et du ventre pour faire de l’espace. C’est comme ça que le ventre « gonfle » à l’inspiration. Il y a un mouvement d’expansion à 360° en-dessous des côtes et de la cage thoracique elle-même, comme un parapluie qui s’ouvre : il ouvre dans toutes les directions en même temps. Cette expansion se fait à partir du bas vers le haut.
À l’expiration, le diaphragme se relâche et remonte, l’air sort, les côtes se referment du haut vers le bas (le parapluie se referme), l’abdomen se resserre et le plancher pelvien s’active, entraîné dans ce mouvement vers le haut. Leurs fibres musculaires sont avantagées par l’étirement qui se produit à l’inspiration et cela facilite leur contraction lors d’une expiration active. Un peu comme un élastique que l’on étire, mais sans trop, pour ne pas l’abîmer, il revient avec puissance à sa position.
À ces grands mouvements du diaphragme lors de sa descente et sa remontée, notre nerf vague est stimulé. C’est le plus long nerf du corps. Il origine de notre cerveau, descend dans le cou et va jusqu’au système digestif, au foie, aux reins, au pancréas, au cœur et aux poumons. Le nerf vague joue un grand rôle au niveau du système parasympathique, branche de notre système nerveux autonome responsable de la relaxation, du repos, de la reconstitution et de la conservation d’énergie. Une respiration calme, lente et profonde peut donc avoir des effets positifs sur la fonction de ces différents organes et notre état d’esprit. C’est également notre seule source de contrôle ou d’action sur notre système nerveux autonome qui est non soumis au contrôle volontaire.
On observe souvent une respiration concentrée dans le thorax supérieur (apicale): les épaules et le sternum montent et descendent à chaque respiration et on observe parfois les muscles du cou se tendre ou tirer à l’inspiration. Beaucoup de tensions musculaires peuvent alors s’y installer. Dans ce type de respiration, la course du diaphragme est réduite et le mouvement se rend peu ou pas dans l’abdomen et le périnée. Ceux-ci n’ont pas la chance de se faire mobiliser à chaque respiration et se retrouvent parfois eux aussi tendus, douloureux et faibles. Ils ne subissent pas le léger étirement qui leur permet de se contracter de manière plus efficace. De plus, cette respiration ne permet pas d’aller stimuler notre nerf vague et d’activer notre système parasympatique. Le système nerveux sympathique prend ainsi le relais. C’est le système de la fuite ou du combat, de la défense ou de l’attaque, c’est l’adrénaline. Cela favorise la libération de cortisol, l’hormone du stress. On ne souhaite pas « baigner » dans le cortisol sur une base chronique. Qui a besoin d’une extradose de stress d’ailleurs? Ça vaut donc la peine de porter une attention particulière à améliorer sa façon de respirer.
Il sera avantageux d’apprendre à envoyer son inspiration vers le bas plutôt que vers le haut. Une première étape peut être de se concentrer sur l’abdomen en le laissant monter/gonfler à l’inspiration et descendre à l’expiration. Par contre, on ne veut pas que ce soit seulement l’abdomen qui prenne tout le mouvement. On veut également du mouvement à la cage thoracique et que les côtes soient mobilisées elles aussi à chacune des respirations pour éviter l’installation de raideurs au thorax. Ces raideurs, si elles sont déjà présentes, peuvent limiter l’expansion des côtes et la pression est alors dirigée vers l’abdomen et le plancher pelvien parce qu’ils offrent moins de résistance, surtout s’ils sont déjà faibles. L’élastique est trop étiré et perd de son efficacité et de sa puissance. Trop de mouvement de l’abdomen peut, par exemple, limiter la guérison d’une diastase des grands droits (séparation des abdominaux en son centre au niveau de la ligne blanche). Cela peut également causer des maux de dos, de hanches et moins de stabilité puisque les muscles de notre unité centrale sont moins efficaces et/ou faibles. Peu de mouvement ou une raideur du thorax à la respiration pourraient aussi être à l’origine de douleurs ou de sensation de tensions au cou ou entre les omoplates.
En plaçant ses mains au bas de la cage thoracique (Fig. 1 et 2), on peut vérifier le mouvement qui s’y produit à la respiration. On devrait sentir les côtes bouger vers le devant, les côtés et l’arrière, s’ouvrir à l’inspiration et se refermer à l’expiration (rappelez-vous le mouvement du parapluie). On peut également vérifier le mouvement du diaphragme en rentrant nos doigts sous nos dernières côtes (Fig. 3). Ils sont normalement poussés vers le bas et l’extérieur à l’inspiration par la contraction du diaphragme et ils retournent sous les côtes à l’expiration par le relâchement du diaphragme.
Je vous invite à prendre conscience de votre respiration à l’aide de ces quelques indications. C’est la première étape afin d’apporter de petites corrections pour graduellement réussir à l’optimiser. Apprendre à utiliser un patron respiratoire efficace et optimal est souvent un des premiers objectifs à atteindre pour l’amélioration de plusieurs problèmes ou désordres musculosquelettiques ou abdomino-pelvi-périnéaux. En clinique, plusieurs techniques pourront être utilisées et expérimentées pour aider à atteindre cet objectif, dont des techniques de mobilisation et de relâchement, d’activation et de recrutement neuromusculaire et des corrections dans l’alignement postural. On veut obtenir une respiration diaphragmatique consciente et active en utilisant les mouvements du diaphragme pour coordonner l’expiration avec le recrutement des muscles du plancher pelvien et des abdominaux. Tout cela pour une meilleure activation et utilisation de notre unité centrale. On appelle ces mouvements associés à la respiration le piston abdomino-pelvien. Cette pratique de base sera très utile à intégrer dans les efforts du quotidien et à l’entraînement. Il me fera plaisir de vous accompagner dans ces apprentissages et ainsi obtenir tous ces beaux bénéfices.
Lysanne Laroche, physiothérapeute